Une étude récente publiée dans Frontiers in Toxicology a évalué l'application du concept d'utilisation essentielle aux substances extrêmement préoccupantes (SVHC) dans le cadre du règlement REACH (Registration, Evaluation, Authorisation and Restriction of Chemicals).
Cet article explore les résultats clés et les recommandations d’une étude récente sur les SVHC.
Dans le cadre du Green Deal, la Commission européenne (CE) a annoncé en 2020 son objectif pour l’élimination progressive des substances les plus nocives pour la santé humaine et pour l’environnement (à moins que leur utilisation ne soit essentielle pour la société). Les produits chimiques les plus nocifs sont définis tels que les produits chimiques classés comme cancérigènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction, persistants, bioaccumulables, affectant les systèmes endocrinien, immunitaire, neurologique ou respiratoire, et/ou toxiques pour un organe spécifique.
Certains scientifiques ont suggéré l’application du « concept d’utilisation essentielle » à certains produits chimiques nocifs, pour contribuer à l’amélioration de la transparence et la prévisibilité du processus réglementaire. Ce concept s’appliquerait à toutes les réglementations pertinentes dont le règlement REACH.
Les SVHC sont des substances sont ajoutées à l’Annexe XIV du règlement REACH uniquement lorsqu’elles sont jugées prioritaires par l’ECHA. Elles sont couvertes par la définition des produits chimiques les plus nocifs car ce sont des substances classées comme :
Pour cette étude, les chercheurs se sont concentrés seulement sur les SVHC soumises à l’autorisation REACH (Annexe XIV), pour lesquelles des demandes d’autorisation ont été soumises à l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA).
Les chercheurs ont analysé 100 utilisations de 11 SVHC, notamment le 4-(1,1,3,3-tétraméthylbutyl)phénol (OPnEO) et le trioxyde de chrome, qui représentaient respectivement 42 % et 35 % des cas étudiés. Ces deux SVHC trouvent leur utilisation dans des secteurs critiques comme l’aéronautique ou la défense, ce qui rends leur usage comme essentiel dans certains contextes. Voici un aperçu de la proportion des utilisations analysées :
Dans cette étude, les chercheurs ont examiné si la fonction technique remplie par la SVHC, telle que décrite dans les demandes d’autorisation et dans le cadre de son utilisation finale, correspondait aux critères d’utilisation essentielle définis par WSP (entreprise spécialisée en ingénierie, en conseil environnemental et en solutions de durabilité, mandatée par la CE pour produire un rapport en 2023 sur le concept d’utilisation essentielle des substances chimiques afin de poser les bases pour guider l’application du concept d’utilisation essentielle dans la législation chimique).
Selon les critères actuels d'utilisation essentielle, 55 % des utilisations ont été jugées essentielles, 10 % non essentielles et 35 % classées comme "complexes" en raison de la difficulté à évaluer leur essentialité. Cette partie présentera les résultats de l’étude sur les SVHC ainsi que les définitions des différentes utilisations essentielles, non essentielles complexes.
Définition d’essentiel : « Une utilisation a été classée comme « essentielle » si l'objectif de la fonction technique d'une SVHC pour une utilisation finale répondait aux critères d'utilisation essentielle, c'est-à-dire qu'elle était couverte par les fonctions techniques définies comme essentielles dans le rapport du WSP. Par exemple, si le seul objectif de la fonction technique d'une SVHC utilisée comme inhibiteur de corrosion était d'assurer la sécurité de l'eau potable pour toutes les utilisations finales (telles que les robinets dans les ménages), l'utilisation serait considérée comme satisfaisant au critère « Prévention de [...] problèmes de santé graves » : Eau insalubre et salubrité de l'eau. Dans ce cas, il a été supposé que la sécurité de l'eau potable serait affectée par la perte de la fonction technique assurée par cette SVHC et que, par conséquent, l'utilisation de la substance serait considérée comme essentielle. »
Les SVHC classées comme essentielles représentent 55% des demandes analysées. Les substances concernées sont les nonylphénols OPnEO et NPnEO majoritairement.
Définition de non essentielle : « Dans un cas d'utilisation « non essentielle », l'objectif de la fonction technique d'une SVHC dans une utilisation finale ne répond à aucun des critères d'utilisation essentielle. »
Les SVHC classées comme non essentielles représentent 10 % des demandes analysées, suggérant que l’autorisation aurait pu être refusée si les critères d’utilisation essentielle avaient été strictement appliqués. Les substances identifiées sont le trioxyde de chrome (utilisé dans le secteur automobile) et le bichromate de sodium (utilisé pour la teinture des textiles).
Définition de complexe : « Une utilisation a été qualifiée de « complexe » lorsqu'il n'a pas été possible de prendre une décision sur une catégorie en raison, par exemple, d'un manque d'informations sur la finalité de la ou des fonctions techniques assurées par la SVHC et/ou d'une incapacité à interpréter les critères, c'est-à-dire à décider si la fonction technique remplit les critères de la directive WSP. »
Les SVHC classées comme complexes représentent 35 % des demandes analysées. Ces utilisations ne peuvent ni être identifiées comme essentielles ni comme non essentielles.
Les auteurs recommandent à la Commission européenne de développer des directives claires pour les demandeurs et de préciser les critères d'utilisation essentielle afin de faciliter le processus d'autorisation sous REACH.
L’analyse de l’étude montre que les informations fournies dans les demandes d’autorisation et les critères d’utilisation essentielle existants ne sont pas suffisantes ce qui mène à des difficultés liées à l’évaluation du caractère essentiel :
Pour améliorer le processus, l’auteur apporte quelques recommandations :
1. Directives claires : Des lignes directrices spécifiques pour les demandeurs devraient être établies afin de :
2. Concept d’utilisation comme service : Il est suggéré de dépasser l'évaluation de la fonction technique d'une substance pour examiner si le service qu'elle fournit pourrait être remplacé par une alternative plus sûre.
3. Révision des descripteurs d’utilisation (ECHA) :
4. Intégration des perspectives sociales :
5. Prise en compte des impacts économiques :
6. Clarté et simplification :
L’application des critères d’essentialité pourrait être un outil puissant pour prioriser l’élimination des substances nocives. Cependant, des ajustements sont nécessaires pour améliorer la clarté des critères, intégrer des perspectives sociales, et mieux définir les fonctions des substances. Cela permettrait de faciliter les évaluations et de renforcer la cohérence et la transparence des décisions réglementaires.
N’hésitez pas à contacter nos experts !
Une étude récente publiée dans Frontiers in Toxicology a évalué l'application du concept d'utilisation essentielle aux substances extrêmement préoccupantes (SVHC) dans le cadre du règlement REACH (Registration, Evaluation, Authorisation and Restriction of Chemicals).
Cet article explore les résultats clés et les recommandations d’une étude récente sur les SVHC.
Dans le cadre du Green Deal, la Commission européenne (CE) a annoncé en 2020 son objectif pour l’élimination progressive des substances les plus nocives pour la santé humaine et pour l’environnement (à moins que leur utilisation ne soit essentielle pour la société). Les produits chimiques les plus nocifs sont définis tels que les produits chimiques classés comme cancérigènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction, persistants, bioaccumulables, affectant les systèmes endocrinien, immunitaire, neurologique ou respiratoire, et/ou toxiques pour un organe spécifique.
Certains scientifiques ont suggéré l’application du « concept d’utilisation essentielle » à certains produits chimiques nocifs, pour contribuer à l’amélioration de la transparence et la prévisibilité du processus réglementaire. Ce concept s’appliquerait à toutes les réglementations pertinentes dont le règlement REACH.
Les SVHC sont des substances sont ajoutées à l’Annexe XIV du règlement REACH uniquement lorsqu’elles sont jugées prioritaires par l’ECHA. Elles sont couvertes par la définition des produits chimiques les plus nocifs car ce sont des substances classées comme :
Pour cette étude, les chercheurs se sont concentrés seulement sur les SVHC soumises à l’autorisation REACH (Annexe XIV), pour lesquelles des demandes d’autorisation ont été soumises à l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA).
Les chercheurs ont analysé 100 utilisations de 11 SVHC, notamment le 4-(1,1,3,3-tétraméthylbutyl)phénol (OPnEO) et le trioxyde de chrome, qui représentaient respectivement 42 % et 35 % des cas étudiés. Ces deux SVHC trouvent leur utilisation dans des secteurs critiques comme l’aéronautique ou la défense, ce qui rends leur usage comme essentiel dans certains contextes. Voici un aperçu de la proportion des utilisations analysées :
Dans cette étude, les chercheurs ont examiné si la fonction technique remplie par la SVHC, telle que décrite dans les demandes d’autorisation et dans le cadre de son utilisation finale, correspondait aux critères d’utilisation essentielle définis par WSP (entreprise spécialisée en ingénierie, en conseil environnemental et en solutions de durabilité, mandatée par la CE pour produire un rapport en 2023 sur le concept d’utilisation essentielle des substances chimiques afin de poser les bases pour guider l’application du concept d’utilisation essentielle dans la législation chimique).
Selon les critères actuels d'utilisation essentielle, 55 % des utilisations ont été jugées essentielles, 10 % non essentielles et 35 % classées comme "complexes" en raison de la difficulté à évaluer leur essentialité. Cette partie présentera les résultats de l’étude sur les SVHC ainsi que les définitions des différentes utilisations essentielles, non essentielles complexes.
Définition d’essentiel : « Une utilisation a été classée comme « essentielle » si l'objectif de la fonction technique d'une SVHC pour une utilisation finale répondait aux critères d'utilisation essentielle, c'est-à-dire qu'elle était couverte par les fonctions techniques définies comme essentielles dans le rapport du WSP. Par exemple, si le seul objectif de la fonction technique d'une SVHC utilisée comme inhibiteur de corrosion était d'assurer la sécurité de l'eau potable pour toutes les utilisations finales (telles que les robinets dans les ménages), l'utilisation serait considérée comme satisfaisant au critère « Prévention de [...] problèmes de santé graves » : Eau insalubre et salubrité de l'eau. Dans ce cas, il a été supposé que la sécurité de l'eau potable serait affectée par la perte de la fonction technique assurée par cette SVHC et que, par conséquent, l'utilisation de la substance serait considérée comme essentielle. »
Les SVHC classées comme essentielles représentent 55% des demandes analysées. Les substances concernées sont les nonylphénols OPnEO et NPnEO majoritairement.
Définition de non essentielle : « Dans un cas d'utilisation « non essentielle », l'objectif de la fonction technique d'une SVHC dans une utilisation finale ne répond à aucun des critères d'utilisation essentielle. »
Les SVHC classées comme non essentielles représentent 10 % des demandes analysées, suggérant que l’autorisation aurait pu être refusée si les critères d’utilisation essentielle avaient été strictement appliqués. Les substances identifiées sont le trioxyde de chrome (utilisé dans le secteur automobile) et le bichromate de sodium (utilisé pour la teinture des textiles).
Définition de complexe : « Une utilisation a été qualifiée de « complexe » lorsqu'il n'a pas été possible de prendre une décision sur une catégorie en raison, par exemple, d'un manque d'informations sur la finalité de la ou des fonctions techniques assurées par la SVHC et/ou d'une incapacité à interpréter les critères, c'est-à-dire à décider si la fonction technique remplit les critères de la directive WSP. »
Les SVHC classées comme complexes représentent 35 % des demandes analysées. Ces utilisations ne peuvent ni être identifiées comme essentielles ni comme non essentielles.
Les auteurs recommandent à la Commission européenne de développer des directives claires pour les demandeurs et de préciser les critères d'utilisation essentielle afin de faciliter le processus d'autorisation sous REACH.
L’analyse de l’étude montre que les informations fournies dans les demandes d’autorisation et les critères d’utilisation essentielle existants ne sont pas suffisantes ce qui mène à des difficultés liées à l’évaluation du caractère essentiel :
Pour améliorer le processus, l’auteur apporte quelques recommandations :
1. Directives claires : Des lignes directrices spécifiques pour les demandeurs devraient être établies afin de :
2. Concept d’utilisation comme service : Il est suggéré de dépasser l'évaluation de la fonction technique d'une substance pour examiner si le service qu'elle fournit pourrait être remplacé par une alternative plus sûre.
3. Révision des descripteurs d’utilisation (ECHA) :
4. Intégration des perspectives sociales :
5. Prise en compte des impacts économiques :
6. Clarté et simplification :
L’application des critères d’essentialité pourrait être un outil puissant pour prioriser l’élimination des substances nocives. Cependant, des ajustements sont nécessaires pour améliorer la clarté des critères, intégrer des perspectives sociales, et mieux définir les fonctions des substances. Cela permettrait de faciliter les évaluations et de renforcer la cohérence et la transparence des décisions réglementaires.
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